Se7en
Réalisation : David Fincher
Scénario : Andrew Kevin Walker
Musique : Howard Shore
Casting principal : Morgan Freeman - Brad Pitt - Gwyneth Paltrow
Synopsis : Le détective Somerset (Morgan Freeman), proche de la retraite, doit s'associer avec une jeune nouvelle recrue (Brad Pitt) afin de traquer un serial killer dont le modus operandi semble être les sept péchés capitaux.
Critique : La fortune sourit aux audacieux c'est bien connu, mais qu'en est-il des deuxièmes chances ?
David Fincher pourrait vous en parler, lui qui sans l'aide providentielle d'un certain Michael De Luca en 1995, alors exécutif chez New Line Cinema, ne serait certainement pas le réalisateur à succès qu'il est aujourd'hui.
En effet, concepteur visionnaire d'une multitude de video clips musicaux très remarqués dans les années 80, Fincher saute le pas du long-métrage en 1992, la Twentieth Century Fox recherchant pour la troisième itération d'ALIEN (1979) un metteur en scène possédant un regard neuf.
La suite, tout le monde ou presque la connaît. Tournage lancé alors que le script n'est pas encore achevé, multiples réécritures au jour le jour, les tensions atteignant un point de non-retour entre le réalisateur et la production. Fincher affirmera plus tard que personne plus que le lui ne déteste autant son film. En 1992 donc, David Fincher n'est pas blacklisté par les studios, mais son avenir s'est extrêmement assombri.
C'est là qu'intervient Michael De Luca qui pousse la production à le choisir pour diriger leur prochain thriller, étant admirateur de son travail sur les clips précités et ayant malgré tout trouvé de très bonnes choses dans cette oeuvre contrariée qu'est ALIEN3 (1992).
Le cauchemar vécu par Fincher sur sa précédente production s'inversera totalement tant le scénario de Se7en constitue sa force. Par contre, de cauchemar il est bien question ici tant ce film suinte le désespoir et la déliquescence de son premier à son dernier photogramme.
Et ce dès le générique de Kyle Cooper où l'on aperçoit les mains du tueur supprimant ses empreintes digitales au moyen d'une lame de rasoir et remplir des pages de cahiers, y apposant des photos toutes plus glauques les unes que les autres en une sorte de scrapbook nauséabond, le tout sur une reprise de Nine Inch Nails.
Le travail d'orfèvre de Fincher (très classique cependant, le réalisateur n'ayant pas encore cédé à certains de ses gimmicks futurs) est sublimé par la splendide photo de Darius Khondji, le film étant quasiment traité comme un film couleur en noir et blanc avec des teintes désaturées et des noirs profonds. La pluie ne cessant jamais de tomber, le spectateur est déjà mal à l'aise bien avant que tout ne se mette en route.
Difficile de parler de Se7en sans gâcher quoi que ce soit pour les gens qui ne l'auraient pas encore vu. Il s'agit principalement d'un thriller psychologique avec une petite touche de néo-noir. L'ambiance par moments évoque les thrillers durs et sans concession des seventies.
L'histoire est rythmée par les jours de la semaine et commence le lundi avec la découverte par la police du corps d'un homme obèse chez lui. Le détective Somerset rencontre sur place Mills son nouveau jeune partenaire avec qui il devra finir sa semaine avant de partir en retraite.
Très vite Somerset n'affiche aucune sympathie avec le jeune loup qui est apparemment très excité de pouvoir montrer ce dont il est capable dans la grande ville. Tout le contraire de Somerset qui, désabusé par les horreurs dont il a été témoin durant plus d'une trentaine d'années de carrière et la quasi impossibilité de rendre justice, n'aspire qu'à tirer un trait sur son métier.
Mills fonctionne aux émotions, son collègue lui est méticuleux, méthodique (il s'endort au son d'un métronome). Ils vont très vite se rendre compte qu'il n'est pas la seule personne méthodique en ville...
En effet au grand dam de son supérieur, il s'avère que les avertissements de Somerset sur l'inévitabilité d'une suite au premier meurtre deviennent réalité : à la gourmandise succède l'avarice. Après le pauvre bougre mort d'avoir été forcé de trop manger, voici l'avocat de la défense obligé de se mutiler.
Observant son jeune coéquipier patauger, Somerset se prend d'affection pour lui et sa jeune épouse et veut bien l'aider dans son enquête en lui fournissant des pistes littéraires sur le sujet des sept péchés capitaux.
Les meurtres horribles vont malgré tout s'enchaîner sans que nos deux compères n'y puissent rien jusqu'au matin du dimanche et la découverte de la 5ème victime.
Il reste alors une demi-heure de métrage et le film va faire un volte-face spectaculaire.
La seule chose possible de divulguer sans gâcher votre plaisir est que la pluie cesse le dimanche.
Il y aura désormais un avant et un après Se7en. Dans les années qui ont suivi, une palanquées de films ont tenté de reproduire la magie, que ce soit dans le contenu, l'esprit ou le visuel. Certains moins mauvais que d'autres, mais la plupart n'ont jamais tenu la comparaison avec le chef d'oeuvre de David Fincher.
D'aucuns diront que la force de Se7en est sa révélation finale qui a traumatisé plus d'un spectateur. En réalité il est bien plus que cela.
Certes cette fin conclut le film de manière magistrale et donne un sens à tout ce qui précède, mais le voyage doit être envisagé comme un tout et cela le public l'a très bien compris à l'époque comme de nos jours lorsqu'on constate que son pouvoir de fascination n'a absolument pas pris une ride.
Et dire que tout ça n'a tenu qu'à une deuxième chance accordée un beau jour de 1995 à un réalisateur en perdition. Au vu de la frilosité actuelle des studios, pas certain que ça se reproduise...
Disponibilité support physique :
- Blu-Ray France Zone B (Warner Bros.)
- Blu-Ray USA Zone Free (Warner Bros.)