Under the Skin est un film britannique de Jonathan Glazer (réalisateur de Birth), sorti en 2013. Il s’agit d’une adaptation d’un roman de Michel Faber.
Le pitch classique qu’on peut lire partout me semble aberrant d’inexactitude, alors je vais tâcher de ne pas le reproduire ici… (Et si vous n’avez pas vu le film, je vous déconseille de consulter wiki, qui le raconte mal et le spoile joyeusement.)
Pitch respectueux :
Une créature, dont on ne connaît pas la nature (mais cela n’a pas d’importance), extérieure à notre monde et au sentiment humain, atterrit dans une ville en Écosse, déguisée en bombasse. Le film suit son point de vue. Ses motivations sont inquiétantes.
La question du point de vue est absolument cruciale, parce que le film a beau être estampillé SF, on est loin loin très loin de films grand public comme Ex Machina, Lucy, ou Alien. Mais alors très loin. Du côté de l’anomalie.
Ce film est donc inclassable, et nos habitudes de spectateur y sont chamboulées :
Dès l’intro du film, après l’apparition du nom de l’actrice à l’écran, on a droit à 20 bonnes secondes de noir total et de silence, et déjà notre patience est mise à rude épreuve, car 20 secondes de noir, c’est long. Je ne sais pas comment vous avez vécu cela, mais chez moi on a cru que le film n’était pas lancé, qu’il y avait un bug d’affichage. C’est idiot hein, mais déjà ça met dans une certaine ambiance, on se trouve tout bête à n’avoir pas compris d’emblée que c’était un choix artistique volontaire.
S’ensuit une série d’images et de sons difficiles à identifier, on ne sait pas trop ce qu’on regarde… On voit des sphères, des jeux de contre-jour, on entend une voix qui scande des mots incohérents au loin, enfin au moins là on sait que c’est volontaire (et on devine un peu plus tard ce que ça voulait dire), mais encore une fois on est totalement dérouté.
Ensuite le film est graduellement plus traditionnel, mais puisque le point de vue n’est pas humain, on reste désorienté, on ne peut pas s’identifier au personnage, on ne peut se raccrocher à aucun code habituel.
Il y a des choses agréables à ressentir dans le visionnage de ce film : via le sens aigu du plan dont fait preuve Jonathan Glazer (déjà magique dans Birth), via la prestation impeccable de Scarlett Johansson, et via la musique qui habite le film, lancinante et prodigieuse.
Et puis il y a des choses moins agréables, par exemple la scène sur la plage, et surtout celle vers la fin où le personnage qu’on suit se fait agresser (désolée pour ce mini spoil, mais je pense qu’il vaut mieux le savoir avant ; moi qui pourtant déteste les spoils, j’aurais préféré qu’on me prévienne en fait).
Pour revenir à ce que je disais au départ : au visionnage de ce film nos habitudes de spectateur sont bouleversées, et en ce sens l’œuvre est très aboutie… et même nécessaire dans le paysage du cinéma. En tout cas, même si je ne pense pas que j’aurai envie de le revoir, je suis contente d’avoir vécu cette expérience.
Vous êtes un cinéphile curieux et intrépide, et vous aussi vous avez survécu au visionnage de ce film d'une rare étrangeté ? Vous avez adoré ou détesté ? Venez en parler !