Le forum étant assez à gauche (ou au centre européaniste), oui, tu risques d'être passé sous silence ou de passer pour un facho. Terme dont on voit mal d'ailleurs en quoi il ne serait pas lui aussi fourre-tout si l'islamo-gauchisme l'est...
Mais tu en as donné une assez bonne délimitation.
Ces deux termes font d'ailleurs partie des réductions relatives qui décrivent cependant des tendances, tels aussi qu'européaniste, écolos, écolos bobo, etc.
Pour autant ils partent effectivement du réel. Car la gauche, et plus encore l'extrême gauche n'ont quasiment plus de force anti-capitaliste. Certes il y a encore des mots, des postures, etc. Je suppose même que d'aucun considère Notre Dame des Landes comme une grande victoire révolutionnaire ou quelque chose comme ça... Mais la réalité est là, Mélanchon lui-même ne renoncerait pas à l'Europe, ni à l'Euro, et continuerait peu ou prou un politique gestionnaire, sans revenu d'existence (ou salaire à vie), sans réforme profonde des institutions... Nada ! Résignation. La puissance de répétition, le lavage de cerveau de l'ultra libéralisme depuis 40 ans a installé finalement une soumission (le titre de Houellebecq est d'ailleurs à tiroir je pense de ce point de vue).
De fait la gauche s'est déplacée. La majorité de l'extrême gauche est plutôt, sur le plan économique et institutionnel, sociale-libérale modérée des années 70. Je ne suis pas certain qu'il y ait beaucoup de militants (encartés) de gauche / gauche + sans travail, ou avec des revenus inférieurs au smic. Si vous avez des données !?
La multiplication des équipements, des biens matériels qui participent à la socialisation, les médias sociaux aussi, le réseautage de plus en plus dépendant des technologies, etc. les a désarmé moralement vis à vis de la critique du matérialisme. Car ils s'y sont totalement soumis et investit. Mais, par posture, ils se veulent des défenseurs, en lutte contre la domination. Si la domination économique est toujours critiquée mais de manière plus floue, parce que moins saisissable, ayant discipliné les imaginaires à être "raisonnables", c'est à dire englués de complexité, de modération, de lenteur, etc. les gens se pensant 'de gauche' se sont retournés vers des dominations plus abordables, moins mal aisées en regard de leur propres pratiques matérielles : racisme, homophobie, patriarcat, etc.
Mélange très hétéroclite car pas de même nature ou culture, et parfois en porte-à-faux (des victimes de racisme peuvent être homophobes ou très patriarcaux par exemple), mais qui leur permet qui plus est de fustiger plus de leurs aînés dont ils veulent les places et les revenus.
A coté de cela, l'écologie politique, réel changement de vision du politique en opposition au positionnement droite gauche construit sous les lumières et réellement installé depuis la fin du 19e s., monte depuis les années 60, mais reste écrasé par les mythes et religions de cette opposition droite / gauche qui structure les intellects, les références historiques, les grandes figures, etc. Et les intellectuels ne sont pas les derniers à rester dans ces chaussons traditionnels à grand coups de Locke, de Rousseau, de Voltaire, de Smith, de Montesquieu, etc. ce qui montre d'ailleurs bien leur passéisme. Les partis politiques sont composés de milliers de postes bien rémunérés, et de dizaines de milliers de dépendants / courtisans de ceux-ci. Ils n'ont donc évidemment pas envie de disparaître, et n'ont aucun intérêt à faire place à l'écologie politique. En France, la gauche se sentant sur la planche savonneuse depuis le renoncement quasi immédiat de 83 et l'édifiant "tournant de la rigueur", a passé les années 90 à noyauter l'écologie pour en faire son auxiliaire, son idiote utile, puis son vase communicant de transfugisme. S'y est donc importée toute une population marécageuse avec ses habitus, en particulier sur la migration, l'homoparentalité, la tolérance pour l'islam comme religion de pauvres, donc intouchable, etc. Et le peu d'intérêt réel pour les fondements de l'écologie politique, leur en ont fait récupérer le nom (le contenant) avec un contenu minimalisé. De fait on observe une fabuleuse modération des militants institutionnalisés (encartés) de cette 'écologie' sur les énergies renouvelables, l'agriculture biologique, l'éducation partagée, la localisation professionnelle, l'urbanisme, etc., qui par contre se démarque bien plus dans les registres de la famille ou des migrations, et dans sa participation à la culpabilisation capitaliste des individus...
Bon, il est vrai que la soumission au libéralisme ne s'est pas imposée qu'aux gens de 'gauche', mais à l'ensemble de la population, ce qui a renforcé sa droitisation, économique et institutionnelle. Un parti écologique qui assumerait réellement des positions fortes aurait bien du mal à se faire entendre...
Au début !
Car qui ne tente rien n'a rien. Qui se dit par anticipation que "mieux vaut y aller tout doucement, insensiblement" (sur quelques centaines d'année ?), voire qu'il vaut mieux attendre tranquillement que le changement se produise tout seul, par magie, n'obtiendra effectivement rien.
L'islamo-gauchisme parle donc un peu de cette décomposition d'une pensée de gauche, non homogène, mais très affaiblie, n'ayant plus de réelle et cohérente vision concrète d'économie politique, réfugiée dans l'idée de la lutte pour la lutte, contre des dominants, des ennemis à qualifier, des boucs émissaires. Or les partis de gauche, leurs salariés ou acolytes, ont vu, durant les années 80 / 90, leur base passer en grande partie de la gauche à la droite, voire à l'extrême droite. En effet le parti communiste, au milieu des années 70, lutte, sans en faire un objectif central, contre le racisme, tout en prônant la limitation de l'immigration qui favorise essentiellement le patronat pour contraindre les salaires. Les mutations des votes ouvriers vont suivre une tendance qui va susciter une détestation aristocratique chez les 'élites' de gauche, et un relatif mépris de classe, qui va s'affirmer chez de nombreux nouveaux arrivants dans cette élite, qui se renouvelle dans une petite bourgeoisie, plus ou moins intellectuelle, plutôt île de francienne ou tout au moins urbaine de grandes villes, excitée par les échanges culturels (cuisine, sexe, musique), et y trouvant des outils de distinction sociale et de valorisation de singularité.
Nous avons ainsi beaucoup de petits blancs et petites blanches, très haineux vis à vis du petit blanc populaire patriarcal, violent, vulgaire, qui a trahit et qu'il faut rayer de la carte.
La figure du migrant acquiert alors par simple inversion d'aversion une aura de sainteté. Le pauvre est plus beau, plus noble. Et cela au prix de l’aveuglement le plus manifeste s'il le faut ! Toute question sur les pratiques culturelles des migrants sont interdites sous peine de racisme. Le patriarcat, la violence, le harcèlement, les féminicides, etc. tout doit rester d'abord et avant une critique des hommes blancs, occidentaux. Tout le reste est trop susceptible d'être du racisme pour être abordé. La pensée s'en retrouve verrouillée, presque abolie.
Il est très difficile de voir par quel bout prendre cette ramification d'impasses qui s'est construite et semble devoir s'entêter pour ne pas sembler se renier, soutenir parfois l'insoutenable pour ne pas risquer de laisser du terrain au "mal" (transcendant et manichéen).
Et le libéralisme radical, qui se dit rationnel, raisonnable, entretien si bien cet égarement utile à sa fabrique des nouvelles inégalités, que le brouillard s'épaissit comme une nuit qui vient, sombre et pleine de terreur...