J'ai toujours voulu avoir un enfant. Depuis toute petite, j'imaginais fonder ma propre famille, il y avait quelque chose de "viscéral". J'avais aussi envie de transmettre, de partager mes valeurs, de construire, de me réparer, de vivre une expérience, de donner la vie : toutes ces raisons, bonnes et moins bonnes, qu'on lit souvent.
J'ai fait deux fausses couches, puis j'ai appris que c'était bien plus fréquent qu'on ne le pensait et que je pourrais effectivement procréer. Mais j'ai compris que si mon compagnon avait été touché par l'échec de ces deux grossesses, c'était uniquement par rapport à moi car lui ne ressentait rien. Il a réalisé qu'il ne voulait pas réellement d'autre enfant à son âge. Il a déjà une fille ado et dix ans de plus que moi, je crois qu'il ne s'était pas rendu compte lui-même à quel point se relancer dans l'aventure ne l'intéressait pas. Je lui en ai voulu, je crois l'avoir détesté sur le coup, autant que je m'en suis voulue d'avoir été incapable de porter la vie quand l'occasion s'est présentée. S'est posée la question de se séparer. Je mentirais si je disais que je l'ai pas envisagé à ce moment-là, mais on s'est laissé du temps et je me suis rendue compte que je ne le voulais pas. Je ne trouvais pas que son non-désir d'enfant était une raison suffisante pour se séparer et il était tout aussi légitime que mon envie d'en avoir. Personne n'avait tort, personne n'avait raison, juste des aspirations différentes. Mon ex voulait des enfants et nous n'avons pas été heureux ensemble, comme quoi ...
Aujourd'hui quelques années ont passé et j'ai fait le deuil d'un enfant "à moi". Je n'en veux plus à personne, je n'ai pas énormément de regret dans mon quotidien et j'aime beaucoup ma vie telle qu'elle est. Je vois même des avantages à ne pas en avoir et je ne sais pas si je me verrais mettre un enfant au monde actuellement. Que ce soit par rapport à l'état du monde en question ou à mes capacités (est-ce que j'aurais eu assez de patience ou su adapter ma vie, faire passer le rythme d'un enfant avant mes envies). Je me demande parfois si j'étais influencée par l'idée reçue selon laquelle on ne s'accomplit pas si on ne fonde pas une famille, si les normes jouaient un rôle dans mon projet ou pas du tout. On ne le saura jamais. Je sais en revanche qu'il existe parfois d'autres sources d'épanouissement et d'accomplissement.
Bizarrement c'est toujours aussi douloureux quand j'apprends une grossesse dans mon entourage (ce que je viens d'apprendre tout à l'heure) même si je ne regrette pas la vie que j'aurais pu avoir. "Choisir c'est renoncer" et "on ne peut pas tout avoir" : je me rends compte à quel point ces deux dictions se vérifient. Mais je ne pensais pas qu'aujourd'hui encore ces annonces me feraient aussi mal. Mais je ne regrette pas, pour plusieurs raisons. Mais c'est dur. Mais ça va. Beaucoup de sentiments contradictoires aujourd'hui.