Partir, route, aller et retour
Il s’éloignait lentement de cette plage, qui à elle seule résumait leur amourette d’été qui ne dura pas plus qu’une lune. L’assourdissant roulement des vagues qui jusqu’alors avait bercé son cœur, résonnait désormais comme un pénible glas, il ne le supportait plus. "Partir sans se retourner, … partir sans se retourner…” , c’était le refrain qu’il répétait dans sa tête, la méthode Coué ayant parait il largement fait ses preuves. Elle n’en finissait plus cette satanée plage, “une fois sur la route, ce monstre froid de goudron, l’affaire serait entendue !” Oui il en était sur, la route était le symbole parfait des départs, des allers simples vers ailleurs, encore quelques mètres et le plus difficile serait fait.
Il n’avait pas dormi de la nuit et quand il la retrouva sous leur palmier préféré, sa mine terreuse et son faciès éteint, lui épargnèrent un pénible discours d’adieu. Evidemment qu’elle avait compris, elle l’avait senti depuis quelques jours, il n’était déjà plus vraiment là. D’ailleurs elle n’avait pas dormi non plus, et était en quelque sorte prête pour la méchante griffure qu’il allait lui infliger.
Du haut de leurs quinze ans, ils savaient bien que la fin des vacances et le retour à la routine ne leur laissaient guère le choix. Finalement ça n’était de la faute à personne, après tout, on ne peut pas vivre que d’amour et d’eau fraîche. Aussi elle prit les devants, mit sa main sur sa bouche en le fixant de ses beaux yeux humides. “Ne dis rien, je comprends, pars ! ne gâchons pas cette belle parenthèse par des mots maladroits”
Elle ne pleura pas pour ne pas aggraver la marée haute, et pour garder la vision claire de ces derniers instants à contempler ce petit prince du camping, dont elle découvrait le dos et qui serait à jamais son premier amour.