J'ai vu ce film hier soir avec ma fille (vous affolez pas, elle a 14 ans, elle ne sera pas traumatisée !) et je ne regrette pas, c'était un film parfait à regarder pour noël
Malgré quelques scènes un peu dures (mais franchement, quelqu'un qui a vu un film de Scorsese ou de Tarantino a vu bien pire !), je trouve l'histoire abordée avec beaucoup de délicatesse.
Parmi tout le bestiaire classique des "monstres" du cinéma, le vampire (puisque c'est de cela qu'il s'agit) est celui qui a le rapport le plus évident avec le romantisme. Toute histoire de vampire contient une histoire d'amour, et ce film ne fait évidemment pas exception.
Ici, le réalisateur prend le mythe à contre pied. Nous sommes plus habitué à voir de frêles jeunes filles tomber amoureuses d'un vampire homme. Les critiques en mal de psychologie freudienne basique y voient là tout un lot de symboles évidents (l'image de la fameuse morsure dans le cou, symbole érotique fort, associée au sang qui coule, symbolisme de la perte de l'innocence et de la virginité, etc.)
Ici, le vampire a ici une apparence féminine, ce qui n'est pas banal (mis à part l'exemple grand-guignoleque de Vampirella), et de plus elle semble très jeune. Cette double entorse au mythe donne un petit vent de fraicheur sur le genre qui commençait à passer de mode. Nous sommes heureusement sortis des années noires ou nous avons vu déferler jusqu'à l'écoeurement la mode des vampires initié par Coppola et Anne Rice (qui nous a quitté récemment), puis repris dans nombre de séries et de films, dont je tairais le nom par charité chrétienne (mais que vous aurez tous reconnus).
Les personnages de vampire ont par ailleurs très souvent une double identité, ce qui est repris par moment ici, où Eli se métamorphose en une femme plus agée quand elle est submergée par son coté vampirique.
La sexualité n'est pas tellement le thème central du film. D'ailleurs, le statut féminin de Eli est remis en cause à plusieurs reprises dans le film. Il s'agit ici plutôt de passage à l'âge adulte par l'émancipation, plutôt que par la perte de l'innocence. Oskar finit par quitter la ville. Il faut dire qu'entre une école où il était rejeté, un père aux abonnés absents et une mère distante (les deux personnages ne sont vus dans la même pièce que pendant quelques courtes secondes, et se parlent à peine), il ne perd pas grand chose.
Par ailleurs, les adultes dans ce film sont plutôt pathétiques et sont les seuls à faire les frais de la soif de Elie.
Bref, je vais arrêter de tergiverser, mais j'ai beaucoup aimé ce film. Je trouve que l'actrice qui joue Elie (Lina Leandersson, merci Google) apporte beaucoup de fraicheur, qui n'est pas sans rappeler la performance de Millie Bobby Brown quand elle interprête Eleven dans Stranger things. Dans les deux cas, on retrouve cette ambiguité : un personnage à la fois mortellement dangereux et fragile.
Au fait, pour ceux qui ne seraient pas d'accord avec mon avis "c'est pas parce qu'il y a du sang que c'est un film d'horreur", voici un argument : ma fille m'a dit que les scènes qui l'ont mis plus mal à l'aise ne sont pas celles où le sang coule à flot, mais celles qui montrent le harcèlement scolaire véçu par le personnage principal. Dans le premier cas, n'importe quel spectateur sait qu'il s'agit de cinéma, alors que dans le second, ce sont des scènes quasi banales d'un quotidien vécu par des milliers d'enfants tous les jours.
Alors, qui sont les monstres ici ? De quel coté est l'horreur ?